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  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    "... Royer-Collard aurait aujourd'hui bien près de cent ans ; les ombres commencent à s'étendre sur sa mémoire. Tout ce qu'il a défendu est tombé, tout ce qu'il a combattu est vainqueur. Il aimait l'antique maison de Bourbon, la monarchie constitutionnelle, la discussion parlementaire, la liberté réglée de la presse et de la parole, le suffrage restreint, le règne paisible des lois ; il détestait la révolution, la république, l'empire, les coups d'état, le règne de la force, le suffrage universel, qu'il accusait de n'être que la force sous un autre nom. Il eût été bien malheureux depuis quinze ans, hâtons-nous de dire qu'il l'eût été trop. Il n'était pas exempt d'exagération, de pessimisme, et l'énergie superbe de ses convictions lui grossissait à la fois le bien et le mal. Ses idées n'ont pas aussi complètement péri qu'elles en ont l'air ; l'apparence les condamne, la réalité leur est moins contraire. Ce n'est pas en vain que trente ans d'un gouvernement libre et régulier ont passé sur la France ; les habitudes et les m¿urs en ont gardé l'empreinte encore plus que les lois. Ce n'est donc pas peine perdue que de suivre M. de Barante dans cette biographie politique d'un homme qui a régné par la pensée, et dont l'esprit ne s'est pas tout à fait retiré de nous..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " ... Ce qui le prouve jusqu'à l'évidence, c'est l'immense supériorité de richesse des peuples chrétiens. Comparez aux plus beaux moments de l'antiquité l'état actuel du monde, et vous verrez quelle différence de population, de puissance et de bien-être ! Partout, dans les derniers temps de l'empire romain, la population décroît avec la richesse; dès que l'esprit chrétien a sérieusement pénétré l'humanité, la richesse renaît et ne cesse pour ainsi dire de grandir jusqu'à nous. Non-seulement cette supériorité se déclare entre le monde chrétien et le monde païen, mais elle apparaît de nos jours avec plus de force entre les nations vivantes. Où en sont les populations musulmanes ou bouddhistes sous le rapport de la richesse comme sous tous les autres ? Les nations chrétiennes au contraire ne cessent de se fortifier et de s'étendre. Comment dire, après de pareils exemples, que le christianisme est, par son essence, contraire au progrès matériel ? Qui ne voit qu'il y a en lui une vertu féconde qui agit sur l'homme tout entier, et qui développe à la fois les forces physiques et les forces morales de l'humanité? Que veut dire ce beau mot de civilisation, ce mot que le monde n'a connu qu'après des siècles de christianisme, s'il ne signifie l'union de toutes les puissances de l'âme, de l'esprit et du corps dans un harmonique et majestueux développement ?..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " Dans les premiers jours du mois de novembre 1846, je débarquais à Alger ; trois autres députés s'y trouvèrent en même temps que moi. Après avoir passé quelques jours dans la capitale de nos possessions, je partis pour l'intérieur avec mes collègues. M. le maréchal Bugeaud, alors gouverneur-général, avait voulu nous servir de guide ; nous traversâmes avec lui le Sahel montueux et pittoresque qui entoure Alger, la plaine célèbre de la Mitidja, les premières chaînes de l'Atlas, la grande vallée du Chéliff ; nous visitâmes les villes de Blida, Médéa, Miliana, Orléansville, Tenès, Mostaganem, et je terminai mon voyage par une courte excursion à Oran. Jamais rien d'aussi étrange et d'aussi nouveau n'avait frappé mes regards; les Arabes, les colons, l'armée, ces trois grandes fractions de la population algérienne, comparaissaient chaque jour devant nous ; la nature africaine, si pleine de mystères et de contrastes, fournissait aussi un aliment inépuisable à notre attentive curiosité ; à chaque pas, des questions nouvelles s'élevaient. Je ne me lassais pas de regarder, d'interroger, craignant toujours de conclure trop vite, et toujours tenu en suspens par la variété et l'immensité du problème..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    "... La zootechnie est avant tout une division de la physiologie. Elle recherche comment il faut s'y prendre pour faire avantageusement de la viande, du lait, de la laine, de la force vivante, de l'agilité, enfin tout ce qu'on demande aux diverses espèces animales. Elle doit étudier les fonctions de la respiration, de la digestion, dans toutes les situations données, avec leurs effets sur la production. Elle a besoin d'immenses travaux anatomiques, pour constater positivement l'influence des conditions extérieures sur les organes, et l'action spéciale de chaque organe sur chaque produit déterminé. Dans les conditions extérieures sont comprises, avec les climats et les soins hygiéniques, toutes les variétés d'alimentation ; de là des études de physiologie végétale très compliquées, pour connaître la nature et l'effet de chaque aliment. On peut pressentir par là le nombre et la gravité des problèmes que la zootechnie se pose, et dont la solution profitera quelque jour à l'espèce humaine, car il y a de grands rapports entre l'animal et l'homme ; on doit comprendre aussi quelle réserve il convient de s'imposer pour en parler, quand on n'est pas soi-même physiologiste..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " ... La première maxime a soulevé, avec raison les plus vives attaques. Quesnay s'y déclare pour le gouvernement d'un seul ; tous ses disciples ont soutenu plus ou moins la même thèse. M. de Tocqueville, dans l'Ancien Régime et la Révolution, relève sévèrement cette erreur et s'en fait une arme contre les économistes. En elle-même, on ne peut la défendre, mais on peut l'expliquer et l'excuser. Il ne faut pas oublier que nous sommes en 1760 : l'autorité royale est absolue et n'admet aucun tempérament. Demander une forme quelconque de liberté politique, c'est rêver l'impossible. Quesnay n'a sous les yeux que la turbulence aveugle et impuissante des parlements ; il connaît l'aversion profonde de Louis XV pour les états-généraux. Il ne peut espérer de réaliser ses idées que par le pouvoir absolu ; il invoque donc ce secours, et il n'a pas tout à fait tort, car s'il doit échouer devant l'inertie égoïste du roi régnant ; il recevra de son successeur un autre accueil. Même sous Louis XV, il ne perdra pas tout à fait son temps. Si le roi lui échappe, il gagnera plusieurs ministres, des conseillers d'état, des intendants, et une part de son esprit pénétrera dans l'administration..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " ...Quand on compare ce qu'était, en Angleterre, l'établissement de 1688 et ce qu'a été, en France, celui de 1830, on est frappé au premier abord des avantages que le second paraît présenter sur le premier. Dans l'un et l'autre cas, la loi de succession héréditaire à la couronne est violée, l'héritier direct est écarté, et celui qui lui succède immédiatement est appelé au trône. Le fait fondamental est donc le même, et, si l'atteinte au principe d'hérédité a été la cause principale de la faiblesse de notre monarchie, il semble que cette cause aurait dû agir avec plus de force contre la monarchie de Guillaume III. Un pareil fait était alors sans précédent, tandis qu'en 1830 on avait l'exemple de 1688, qui avait si pleinement réussi. En général, c'est un grand bénéfice historique que de venir le second, de n'avoir point contre soi la nouveauté de la tentative et de pouvoir invoquer l'autorité d'un succès précédemment obtenu dans des circonstances analogues. Jusqu'au dernier jour, cet exemple de 1688 a été la grande présomption, le puissant argument en faveur de la durée de la dynastie d'Orléans, tandis que rien de pareil ne pouvait être invoqué en faveur de Guillaume III..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " Dès que commence la seconde moitié du XVIIIe siècle; on voit naître l'économie politique sur presque tous les points de l'Europe à la fois. En Italie, Verri et Beccaria jettent les premiers fondements de cette nouvelle science, et, ce qui vaut encore mieux, l'administration du comte Firmiani en Lombardie, celle du grand-duc Léopold de Toscane, en pratiquent les principes naissants pour le bonheur des populations. En Espagne, Campomanès, que va bientôt suivre Jovellanos, fait entendre dans le pays classique des monopoles, du système prohibitif et des préjugés monétaires, bon nombre de vérités utiles qui ne l'empêchent pas de devenir président du conseil de Castille. En France, le médecin de Louis XV, le docteur Quesnay, publie son Tableau économique, et autour de lui se presse un groupe d'amis et de disciples, Gournay, d'Argenson, Mirabeau père, Lemercier de La Rivière, Dupont de Nemours, et enfin le plus illustre de tous, Turgot. En Angleterre, où, depuis la révolution de 1688, tout ce qui peut contribuer au bon gouvernement des nations était plus librement étudié qu'ailleurs, une foule de publications se succèdent sur les questions d'intérêt public, et l'économie politique arrive à trouver sa forme à peu près définitive dans les travaux d'un simple professeur écossais, Adam Smith. On s'est beaucoup demandé quelle avait été la part exacte de chacun de ces écrivains dans l'édifice de la doctrine économique: question insoluble et superflue ! Qui peut compter la multitude des sources qui contribuent à former un ruisseau, et la multitude des ruisseaux qui contribuent à former un fleuve ?..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " ... Charles-Irénée Castel, abbé de Saint-Pierre, naquit au château de Saint-Pierre-Église, près de Cherbourg, à peu de distance d'un autre château qui a donné naissance de nos jours à un philosophe également ami de l'humanité, M. de Tocqueville. Son père, Charles Castel, marquis de Saint-Pierre, était bailli du Cotentin et gouverneur de Valognes, sa mère était s¿ur de Mme de Villars, mère du maréchal. Le second de cinq enfants, il fut d'abord destiné au métier des armes ; mais, la faiblesse de sa complexion lui ayant interdit cette carrière, il dut se tourner vers l'église. Il eut un moment dans sa jeunesse la velléité de se faire religieux, et il a raconté lui-même en termes assez piquants comment cette idée lui passa. Segrais, homme d'esprit, me dit un jour que cette fantaisie de se faire religieux ou religieuse était la petite vérole de l'esprit, et que cette maladie prenait ordinairement entre quinze et dix-huit ans ; j'en fus attaqué à dix-sept. J'allai me présenter au père prieur des prémontrés réformés d'Ardenne, près de Caen ; mais, par bonheur pour ceux qui profiteront de mes ouvrages, il douta que j'eusse assez de santé pour chanter longtemps au ch¿ur, et me renvoya consulter un vieux médecin qui me dit que j'étais d'une santé trop délicate. J'ai donc eu cette maladie ; mais ce n'a été qu'une petite vérole volante dont je n'ai point été marqué. ..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " Libéralisme et socialisme, ces deux mots ont exprimé jusqu'ici des idées antipathiques. Dans tous les systèmes d'organisation que les différentes sectes socialistes ont mis en avant, la liberté individuelle de l'homme est généralement comptée pour rien. Voici un écrivain socialiste qui se distingue au contraire par un profond sentiment de la liberté humaine : cet écrivain est M. Proudhon, l'auteur du livre sur la Propriété, publié il y a quelques années, le rédacteur actuel du journal le Représentant du Peuple, un des plus radicaux assurément, un des plus violents dans les termes parmi les nouveaux réformateurs, mais qui rachète à mes yeux tous ses emportements par son respect pour cette pauvre liberté dont les théoriciens de la nouvelle république font si bon marché. Un conservateur de la veille, un malheureux doctrinaire comme moi, est plus près de s'entendre avec un tel homme qu'avec beaucoup de gens qui paraissent plus modérés, et j'ai lu les livres de M. Proudhon avec plus de sympathie que de colère. La forme en est un peu rude, j'en conviens, et met à l'épreuve la patience, mais ce n'est plus le moment d'être difficile et de faire le délicat..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " Sous l'ancien régime, la dignité la plus éclatante, la plus enviée, était celle de maréchal. Alors comme aujourd'hui, cette nation belliqueuse estimait avant tout les services militaires. La maison de Broglie, d'origine piémontaise, venue en France au commencement du XVIIe siècle, avait atteint en 1789 le plus haut point d'illustration, parce qu'elle avait fourni coup sur coup trois maréchaux. Le premier, Victor-Maurice, qui n'avait encore que le titre de comte de Broglie, fit avec Louis XIV les campagnes de Flandre et de Franche-Comté en 1667, et 1668; il fut nommé ensuite commandant du Languedoc. Le second, François-Marie, prit une part glorieuse à la bataille de Denain, qui sauva la France. Ambassadeur en Angleterre, commandant général de l'Alsace, commandant en chef de l'armée d'Italie et de l'armée de Bohême, il fut fait duc en 1742. Le troisième, Victor-François, fut le héros de la guerre de sept ans : nommé maréchal à quarante-deux ans, gouverneur de Metz, ministre de la guerre, il avait reçu de l'impératrice Marie-Thérèse, après une bataille gagnée contre les Prussiens, le titre de prince de l'empire pour lui et ses descendants..."

  • von Leonce de Lavergne
    16,00 €

    " Quand l'Europe littéraire et politique a appris, il y a déjà quelques aunées, que la reine Isabelle d'Espagne avait choisi pour son ambassadeur à Naples M. le duc de Rivas, on s'est généralement attendu que le séjour d'un homme aussi passionné pour les travaux et les plaisirs de l'esprit dans cette contrée favorisée, au milieu des loisirs élégants de la vie diplomatique, ne serait pas sans fruit pour les lettres. On ne s'était pas trompé. Sous ce nom aristocratique, sous ce brillant manteau d'ambassadeur, se cache, comme on sait, un des esprits les plus polis et les plus aimables de notre temps, un de ces poètes qui donneraient volontiers tous les duchés et toutes les ambassades du monde pour une heure d'inspiration. Comme son compatriote et son ami, aujourd'hui son voisin d'ambassade, M. Martinez de la Rosa, l'auteur du Bâtard maure et des Romances historiques a toujours trouvé, dans les accidents les plus divers de son orageuse carrière, le temps de penser et d'écrire. Même au milieu de la vie des camps et durant les épreuves amères de l'exil, il cherchait des consolations dans la poésie. Aujourd'hui, parvenu au faîte des grandeurs, et, ce qu'il estime à coup sûr davantage, libre de jouir, après tant de travaux, d'un repos au moins momentané, il ne pouvait pas oublier les chères habitudes de toute sa vie ; c'est à la muse plus grave de l'histoire qu'il a consacré ses années tranquilles..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    "...Mais que parlons-nous d'aujourd'hui ? Ce moment est déjà loin de nous ; cette poussière est tombée. Une autre question s'est posée d'elle-même : pourquoi, tandis que l'Angleterre, avec sa constitution informe et vigoureuse, semble braver toutes les secousses, sommes-nous en France impuissants à soutenir nos institutions, si bien conçues en apparence, si rationnelles et si symétriques ? Aussitôt on se met à discuter l'aptitude des Français aux libertés politiques. Sur ce sujet, des traits cuisants pour l'amour-propre national nous sont encore tous les jours décochés à plaisir de l'autre côté de toutes nos frontières. Parmi nous, le fâcheux problème s'agite dans la presse, dans les livres, dans la chaire même, et la plupart le résolvent contre nous, les uns avec joie et ironie, comme un beau résultat, les autres avec l'amertume du regret. À peine posée toutefois, cette question, comme les autres, remonte dans l'histoire et y cherche son explication. Est-il donc vrai que nous soyons tout à fait incapables du plus noble privilège de la nature humaine, de celui qui fait son excellence, de celui qui, dans l'ordre politique, correspond au libre arbitre dans l'ordre moral ? Qui nous a infligé cette déchéance ? Faut-il en vouloir à l'esprit niveleur et centralisateur de la monarchie, qui, dès avant 1789, avait étouffé tous les germes des libertés anciennes avec les usages et les habitudes qui en faisaient la vie ? Faut-il s'en prendre à l'esprit exclusif de la noblesse et aux vues étroites du tiers-état, qui n'ont point su s'associer contre les envahissements de l'administration royale et se fondre dans un même intérêt ?..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " Lorsqu'à trente ans de distance on parcourt les écrits qui ont fait la renommée de Lamennais, on ne se trouve point toujours dans le passé. Et d'abord, à n'en regarder que la partie politique, il est clair qu'elle renferme tous les éléments de la révolution profonde qui travaille aujourd'hui Rome. Chose singulière, dans les évolutions successives de sa seule pensée, Lamennais a tour à tour formulé et personnifié la signification des trois partis qui se disputent sous nos yeux l'état pontifical, ce sanctuaire déjà rétréci et encore menacé du monde catholique. Dans sa première période, il était le théoricien de ce qu'on pourra désormais appeler l'ancien régime romain. Un pouvoir spirituel absolu tenant sous sa main les princes absolus comme ses ministres pour le bien, dirigeant de haut la politique dans l'intérêt de la religion, réprimant l'hérésie par le concours de la loi civile, et constituant ainsi, par le dogme appuyé sur la force, l'unité des esprits dans les états chrétiens, tel était l'idéal du moyen âge, que l'auteur de l'Essai sur l'Indifférence se proposait alors de perfectionner pour l'avenir, et c'est bien là l'esprit du régime qui succombe en ce moment. - Dans sa seconde période, désabusé des rois et de l'efficacité de la force,..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " ...D'où a pu venir aux Américains cette confiance extrême en une vocation particulière, cette conviction, si bizarre en présence de leurs faits actuels, qu'ils sont comme un peuple choisi par la Providence pour régénérer les nations ? Elle est provenue d'un faux enseignement historique, longtemps seul répandu parmi eux. Ils s'étaient habitués à considérer leur république comme une création de l'intelligence, comme l'expression d'une théorie de liberté rationnelle et d'égalité morale conçue et réalisée par leurs ancêtres. On comprend en effet que, lorsqu'une nation se fonde dans une fermentation à la fois politique et religieuse, comme ce fut le cas des colonies américaines, formées par l'alliance du calvinisme avec l'élément communal et républicain de l'Angleterre, les deux causes s'unissent et s'entrelacent avec force par leur besoin mutuel et leur danger commun. L'état alors se formule volontiers, au milieu de ses premières épreuves, comme l'expression terrestre de l'église invisible. Plus tard, les orateurs, les prédicateurs et les panégyristes, parlant à la foule aux jours de fêtes et aux anniversaires nationaux, donnent, par un pur besoin oratoire, aux hommes du vieux temps des proportions surhumaines, et à leurs institutions les plus nécessaires et les plus naturelles des raisons idéales..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " ...Mais c'est dans Sophocle qu'il nous faut chercher la plus haute expression du drame grec : Eschyle, pénétrant dans les arcanes du sanctuaire, y avait saisi la pensée religieuse, et l'avait traînée au grand jour de la vie profane, où la liberté philosophique et artistique s'en emparait. C'était, aussi bien que dans Sophocle, l'esprit d'Homère, esprit novateur, rival du sacerdoce, auquel il retirait l'autorité d'interprétation pour la livrer à tout le monde. Cependant l'¿uvre d'Eschyle ne fut qu'un sublime essai ; ses pièces, extrêmement simples, ne sont en réalité que des épisodes, comme on les appelait, intercalés dans les ch¿urs ; en outre, le merveilleux occupe encore une grande place ; des scènes aussi fantastiques que celles du Prométhée et des Euménides annoncent que le mythe exerce encore une grande influence. Sophocle apparaît, et, comme Neptune, en trois pas il franchit une immensité. Chez lui, le merveilleux, le gigantesque, ne se montrent presque plus sur la scène ; quand des personnages divins s'y présentent accessoirement, comme dans Ajax et dans Philoctète, ils sont rapprochés de l'humanité ; les dieux de Sophocle sont aux dieux d'Eschyle ce que les dieux de Phidias sont aux statues de l'école d'Égine..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " Qu'Aristophane ait été de son temps une puissance, c'est ce qu'on devrait présumer à le lire, lors même que ses contemporains ne l'auraient point positivement attesté. Un pamphlétaire dramatique (car la plupart de ses pièces sont des pamphlets de circonstance mis en scène, et ne contiennent qu'en germe ce que nous appelons comédie), un pamphlétaire dramatique qui pouvait impunément, dans une ville tiraillée par des partis, des intrigues et des révolutions, assaillir du haut du théâtre les chefs les plus populaires, déchirer la démocratie régnante, insulter aux dieux au milieu de leurs fêtes, dire toutes sortes de vérités déshonorantes aux passions exaspérées, un tel homme assurément s'imposait plutôt qu'il n'était accepté. Aussi dit-il lui-même, avec un légitime orgueil, qu'il s'est fait une réelle importance par son audace à démasquer tous les mensonges des adulateurs du peuple : c'est pourquoi les Lacédémoniens le haïssent, parce qu'il est de leur intérêt que le peuple athénien continue à se laisser flatter et tromper ; c'est pourquoi le roi de Perse, quand il veut savoir la situation des Grecs, s'informe de leur marine premièrement, et en second lieu de l'effet des comédies d'Aristophane..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " Y a-t-il une philosophie dans Homère ? Trouve-t-on, dans cette poésie grande et simple, les éléments de la fonction rationaliste que la Grèce exerça dans l'histoire ? Y trouve-t-on l'origine intellectuelle de la lutte de l'Europe progressive contre l'Orient enterré dans ses symboles ; lutte continuée, souvent par les armes, toujours par les idées, à travers la monarchie d'Alexandre, l'empire romain et la chrétienté du moyen-âge, jusqu'au temps présent, qui paraît appelé à la finir par la victoire définitive de la civilisation européenne ? Cette question reste encore à traiter.Il faut d'abord signaler dans Homère les traces d'un fait fondamental, reproduit depuis dans la formation des sociétés modernes, mais qui, au temps où nous nous reportons, était nouveau dans le monde, et détermina la destinée toute spéciale de la nation des Hellènes. Je veux parler de la lutte séculaire entre la cité théocratique et la tribu conquérante, entre une autorité de tradition et de pensée, et une liberté d'instinct, de nature, de force ; en un mot, entre le sacerdoce et l'ordre militaire..."

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " ...Après Homère, c'est Eschyle qu'il faut interroger sur l'esprit de la Grèce. Moins simple et moins vaste, plus moderne et plus intense, il s'appuie, avec une attitude plus prononcée et un regard plus austère, sur la même pensée fondamentale. L'étude que nous en essayons n'étant point purement littéraire, nous renoncerons, quoique à regret, à nous arrêter sur la considération du style, sur la puissance expressive d'Eschyle, et cependant, chez lui surtout, le langage est l'explosion de la pensée ; on dirait que son émotion comprimée brise la langue d'Homère pour en réunir les débris en mots nouveaux compliqués connue des symboles, et dont l'image multiple se présente comme un groupe de marbre. Sculpture, peinture, musique, mouvement, le relief, la ligne, le rythme, je dirais presque la danse sacrée de sa parole, rendent admirablement, par toutes les ressources de l'expression humaine, la nature et la vie particulière de ses ouvrages. D'une simplicité élémentaire dans la composition du drame, il le remplit quelquefois presque tout entier de lamentations lyriques, longues, obscures, monotones, - et telle est néanmoins la vibration magique qui tremble sur toutes ces cordes, qu'on se sent ému en même temps qu'étourdi, parce que sous le mot rude ou éclatant, sous la vétusté du mythe, sous l'image qui rayonne en passant, il y a toujours ou une prière, ou une indignation, ou une pitié..."

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    Il y a dans les sciences humaines bien des motifs de satisfaction et d'orgueil pour l'esprit, mais les raisons d'humilité et d'amertume n'y manquent pas non plus. En dépit des persévérants efforts et des longues pensées des légions d'investigateurs qui nous ont précédés, la nature a des abîmes noirs et profonds en face desquels toute clairvoyance devient de la cécité, toute hardiesse de la crainte, et toute confiance du découragement. Quand nous essayons de projeter quelque lumière à l'intérieur de ces gouffres mystérieux, cette lumière ne nous y fait apercevoir que les spectres de notre propre ignorance, et nous ne retirons de cette vaine tentative qu'un nouveau sentiment de notre impuissance et de notre misère. Il serait sage d'en retirer encore autre chose, je veux dire une leçon profitable. En effet, rien ne devrait rappeler à la modestie et à la patience, refroidir les ardeurs présomptueuses et confondre les audacieuses témérités comme l'étude de ces phénomènes que la Providence semble avoir établis tout exprès pour déconcerter la curiosité des hommes...

  • von Louis Binaut
    16,00 €

    " ... Ainsi, en Toscane comme ailleurs, un antagonisme déjà très animé entre le pouvoir civil et la puissance ecclésiastique se manifestait de lui-même ; un ordre nouveau cherchait spontanément à se dégager de l'ordre ancien. Si les vues particulières des princes lorrains donnaient plus d'activité à cette fermentation, longtemps étouffée par les grands-ducs de la maison de Médicis, il y avait aussi une opinion indigène déjà formée, et qui soufflait dans le même sens. Les ministres de François ne manquaient pas d'ailleurs de rattacher leurs projets à une tradition déjà ancienne, quoique interrompue par les événements, à des actes qui remontaient aux plus beaux temps de la république. Ils rappelaient que, dès 1346, les magistrats s'étaient déjà fatigués de rencontrer trop souvent sur leur chemin une puissance indépendante de l'état, qui s'ingérait dans, les affaires purement civiles, et qu'ils avaient puni sévèrement les agents du saint office pour arrestation arbitraire. On avait même fait alors un règlement remarquable qui limitait les pouvoirs de l'inquisition, supprimait une partie de ses agents, fermait ses prisons, et, pour rendre ces dispositions statues, fondait un corps spécial et permanent de magistrats nommés les quatorze défenseurs de la liberté, chargés d'examiner tous les actes de juridiction émanés de la puissance ecclésiastique..."

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    Les recherches scientifiques entreprises avec la méthode expérimentale sont généralement de nature soit à perfectionner la conception doctrinale du monde, soit à provoquer d'utiles applications dans le domaine des arts et de l'industrie. Quelquefois elles, réunissent ces deux avantages. La question toute récente des régénérations et des greffes animales offre au plus haut point ce double intérêt. Elle éclaire les théories physiologiques, elle fournit des ressources nouvelles à la pratique médicale ; mais elle a encore un autre caractère singulièrement remarquable, c'est que les résultats déterminés qu'elle nous procure concourent à la fois à vérifier les intuitions les plus hardies du génie philosophique d'autrefois, et à justifier les espérances les plus audacieuses des naturalistes qui croient à la toute-puissance de l'homme dans l'avenir. C'est ce que nous nous proposons de montrer succinctement...

  • von Louis Vitet
    17,00 €

    L'ancienne cathédrale de Noyon n'a pas la célébrité qu'elle mérite. Elle ne peut lutter, il est vrai, ni en étendue, ni en élévation, avec ces immenses églises qui font la gloire de Chartres, de Reims ou d'Amiens ; mais la beauté de son plan, la sévérité de ses formes, l'harmonie de ses proportions, lui donnent droit à être comptée parmi nos monuments religieux du premier ordre. Ajoutons qu'il y a dans sa construction certaines particularités qui en font des types les mieux caractérisés de cette époque de transition, où l'arcade à plein cintre, dépossédée de sa vieille suprématie, et près de disparaître pendant trois siècles de notre sol, se mariait encore à l'ogive victorieuse et envahissante.C'est surtout à ce titre, c'est comme objet d'étude, comme document utile à la solution de problèmes encore obscurs, que ce monument aussi important que peu connu mérite une sérieuse attention. Plus son architecte présente de remarquables anomalies, plus il importerait de pouvoir fixer avec certitude les dates auxquelles se rapporte chaque partie de sa construction...

  • von Louis Vitet
    16,00 €

    Parmi les peintres d'élite, les uns déjà dans la tombe, les autres encore debout, qui depuis un demi-siècle ont illustré notre école, Ary Scheffer occupait non-seulement un des premiers rangs, mais une place à part. Cette place, il l'avait conquise par une originalité véritable, par quelque chose qui lui était propre dans la manière de percevoir et d'exprimer le beau. Talent sincère, naturel, indépendant, fidèle à sa vocation, sans souci de la mode, sans trouble du succès des autres, il avait la foi de l'artiste, et ce n'était pas là sa moindre originalité. Cette foi, qui décline et périt d'heure en heure chez nos plus jeunes et chez nos plus habiles, chez lui ne faisait que grandir à mesure qu'il prenait des années. Chaque jour, il devenait donc une exception plus rare, un contraste vivant plus utile à observer, un plus précieux exemple. Aussi, lorsque naguère la mort l'est venue frapper avant le déclin de l'âge et à l'apogée du talent, l'émotion a été profonde, le regret unanime...

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    La physique, la chimie et la physiologie contemporaines s'étendent prodigieusement en surface ; mais peut-être ne remarque-t-on pas assez qu'en même temps elles montent et aspirent aux sommets. A mesure que les procédés se renforcent et que les doctrines se consolident, la science, plus audacieuse, aborde plus résolument les questions élevées, et prétend y porter une lumière décisive. Elle entreprend avec des méthodes précises et une régularité très assurée la discussion des problèmes les plus généraux et les plus compréhensifs. Ne trouvant plus de limites ni à l'exploration du monde des soleils, ni à l'exploration du monde des atomes, s'imaginant d'ailleurs que cette double enquête lui livrait tous les secrets de la matière et de l'esprit, il ne faut pas s'étonner qu'elle ait cru en pouvoir tirer la connaissance de ce qui semblait jusqu'ici réservé à d'autres capacités que les siennes. Justifiée ou non, cette tendance philosophique de la science moderne n'en est pas moins le résultat d'un ensemble de découvertes pleines d'intérêt malgré leur nature souvent abstraite, pleines de féconds enseignements sous l'apparente stérilité de leurs détails...

  • von Louis Vitet
    16,00 €

    ... Trois causes principales mettent, à mon avis, la Flandre et la Hollande hors de pair avec tous les pays réputés les plus riches en tableaux hollandais et flamands.La première est qu'on ne peut voir qu'en Flandre cinq ou six vieux chefs-d'¿uvre, derniers et incomparables témoins de l'art flamand primitif ; la seconde, qu'au XVIIe siècle, à son âge viril, ce même art a produit en Hollande certaines ¿uvres vraiment exceptionnelles et par la dimension des toiles et par la puissance du pinceau, ¿uvres restées dans le pays, destinées à n'en jamais sortir, et qui révèlent chez ceux qui les créèrent des dons et des facultés qu'ailleurs on ne leur connaît pas. Vient enfin la troisième cause, qui risque par malheur de disparaître un jour, et qui déjà s'est beaucoup affaiblie : je veux parler des collections particulières que l'esprit de famille a sauvées jusqu'ici, dernier reste des nombreux cabinets formés il y a deux siècles, aux jours les plus brillants de l'école hollandaise ; petits musées harmonieux et épurés, où chaque maître semble avoir travaillé pour un ami ou pour un bienfaiteur, et s'est comme efforcé de dire son dernier mot...

  • von Louis Vitet
    16,00 €

    Eustache Lesueur naquit à Paris en 1617, originaire de Montdidier en Picardie, était un sculpteur assez médiocre qui avait encore moins de fortune que de talent, mais qui sut reconnaître de bonne heure les dispositions de son fils pour le dessin. Ne se sentant pas de force à lui servir de guide, il se hasarda à soumettre ses essais enfantins au peintre alors à la mode, au peintre tout puissant, au premier peintre du roi, Simon Vouet, qui consentit à recevoir le jeune Lesueur dans son école.Vers la même époque, un autre enfant, moins âgé de deux ans, fils aussi d'un pauvre sculpteur, était introduit dans l'atelier de Vouet ; il se nommait Charles Lebrun. Mais, comme si la destinée de ces deux hommes n'eût pas voulu se démentir un seul jour, tandis que Lesueur était admis par grâce et presque par charité, Lebrun se voyait reçu avec empressement et déférence. Un puissant personnage, le chancelier Séguier, lui avait ouvert la porte, et s'engageait à le protéger de sa bourse et de sa faveur...

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    Jusqu'à ces derniers temps, toutes les fermentations étaient considérées comme produites par la décomposition spontanée d'une matière organique au sein du liquide fermentescible. On disait qu'au contact de l'air cette matière organique éprouve une altération particulière qui lui donne le caractère de ferment ; on voyait en celui-ci un agent capable de communiquer un mouvement de décomposition. La levure de bière, il est vrai, était depuis longtemps connue : on savait qu'elle est formée de cellules, qu'elle est organisée ; mais on n'établissait point de solidarité entre cet état d'organisation et les phénomènes de fermentation qu'elle détermine au sein des liquides sucrés tels que le jus de raisin ou le moût de bière. Turpin et après lui Cagniard-Latour, dans le premier tiers de ce siècle, avaient essayé vainement de démontrer l'existence d'une pareille solidarité ; on refusa toujours de voir dans la fermentation alcoolique autre chose qu'une opération analogue à toutes les décompositions lentes rangées parmi les fermentations...

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    Jadis les dépouilles de la mort étaient le lot de l'anatomiste, tandis que le physiologiste avait en partage les phénomènes de la vie. Aujourd'hui on soumet le cadavre aux mêmes expériences que l'organisme vivant, et l'on recherche dans les débris de la mort les secrets de la vie. Au lieu de ne voir dans le corps inanimé que des formes prêtes à se dissoudre et à disparaître, on y découvre des forces et des activités persistantes dont le travail est profondément instructif. De même que les théologiens et les moralistes nous invitent à contempler quelquefois face à face le spectre de la mort et à fortifier notre âme dans une courageuse méditation de l'heure dernière, la médecine considère comme une nécessité de nous faire assister à tous les détails de ce drame lugubre pour nous conduire, à travers les ombres et les obscurités, à une science plus claire de la vie ; mais cela n'est vrai que de la médecine la plus moderne...

  • von Fernand Papillon
    16,00 €

    La question de la chaleur et de la vie n'a pu être résolue pleinement que par le concours simultané de la physique, de la chimie et de la biologie. L'ancienne physiologie traitait empiriquement de la chaleur animale, mais sans en pouvoir expliquer l'origine. Il a fallu pour cela les découvertes de Lavoisier et les investigations plus modernes de la thermochimie. Après avoir montré comment naît cette chaleur, il importait d'enseigner ce qu'elle devient ; c'est la thermodynamique qui nous l'a révélé. Enfin l'expérimentation physiologique la plus délicate a pu seule déterminer les modifications qui surviennent chez les êtres vivants, lorsqu'ils sont soumis à l'influence d'une température soit supérieure, soit inférieure à celle qu'ils possèdent normalement. La médecine et l'hygiène tirent déjà profit des indications fournies à ce sujet par la science pure. On a reconnu que l'étude des variations de la chaleur animale dans les maladies a une importance notable pour la connaissance de celles-ci, et que le diagnostic aussi bien que le pronostic en reçoivent des lumières inattendues...

  • von Louis Vitet
    16,00 €

    Depuis que nous savons, par quelques mots du Moniteur, que la collection Campana ne sera pas érigée, comme on le pensait d'abord, en musée spécial et indépendant, qu'on ne lui bâtira pas un palais, et qu'elle ira tout simplement se fondre dans les galeries du Louvre, remarquez-vous comme on en parle moins? Jusque-là c'était un enthousiasme qui ne pouvait se contenir, et dont pendant trois mois tous les journaux, le Moniteur en tête, nous envoyaient l'écho chaque matin, D'où vient le calme d'aujourd'hui? Pourquoi cette froideur subite ? Tout ce concert d'admiration n'était-il donc qu'un plaidoyer, et parce que la sentence est rendue, les avocats n'ont-ils plus rien à dire ? ou bien serait-il vrai, comme ils l'annonçaient tous, que le principal intérêt de cette collection était dans son autonomie, que diviser cet harmonieux ensemble, rompre ce précieux faisceau, c'était nécessairement diminuer la valeur non-seulement de la collection même, mais de chacun des objets dont elle est composée ?...

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